Extrait du livre UN SOU POUR SA SURVIE

Beaucoup en ont dans leurs familles, mais personne n’en parle. C’est compliqué pour un adulte, encore pire pour un enfant. Certains préfèrent les cacher, d’autres les attacher. Ceux qui s’échappent, courent les rues dans l’indifférence générale. J’ai choisi de faire autrement. Je veux croire que dans ce pays où la Téranga est crédo, il ne manque pas une âme charitable qui sera sensible à ma détresse.
Je veux croire que le serment d’Hippocrate n’est pas que des mots que débitent des hypocrites en blouse blanche. On me demande de l’argent pour des médicaments en rupture tous les deux jours. On me dit que parmi le peu de psychiatres qui existent, peu sont dans les hôpitaux. Certains font des recherches, très peu font de soins, une infime poignée pratiquent la pédopsychiatrie et ma fille doit attendre dix-huit mois avant de pouvoir en consulter un.
Dites -moi Madame le Ministre de la santé que dois-je faire ?
On me propose de lui ligaturer les trompes pour éviter les grossesses, de l’attacher. On me propose même des rapports sexuels avec elle pour ouvrir les portes de la réussite.
Dites-moi Madame le Ministre de la Femme, de la Famille et du Genre, que dois-je faire ?
Depuis 2001, notre pays célèbre la journée mondiale de la santé mentale, mais la situation se dégrade d’année en année. Les Maires des villes se saisissent de cette journée pour dénoncer le nombre croissant de malades dans les rues. Ils ne veulent pas de ces malades et l’affichent clairement. Aucune structure sérieuse n’existe pour endiguer ce fléau. Ma fille a échappé à ma vigilance pendant trois jours. Elle a rejoint une bande de marginaux qui s’affichent et cela ne choque personne. Elle aurait pu être violée, tuée ou sacrifiée. Je suis à bout de force. L’Etat m’a abandonné, l’hôpital me congédie et ma famille me fuit comme une pestiférée.
Dites-moi Monsieur le Président de la République, que dois-je faire ?
Ce sont ces derniers mots que ni Moussa ni sa famille ne lui pardonnèrent. Le linge sale ne se lave pas en public et Penda avait violé cette règle. Ce fut la déchirure. Elle était désormais seule dans cette bataille.

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